Paolo Doss, « le clown philosophe »

Au manteau bigarré, aux chaussures trois fois trop longues et au gros nez rouge, qui composent l'image traditionnelle ,du clown, Paolo Doss a troqué une tenue de clochard. C'est que le comédien se veut résolument un clown dans l'air du temps, proche des préoccupations sociales de notre époque. Pas grand chose, pourtant, prédestinait ce fils de père égyptien et de 111ère italienne à monter sur scène. Après des études laborieuses, le jeune Paolo s'était lancé dans la publicité, un secteur, certes créatif, mais qui le démotivait, vu le «manque d'âme» qui règne dans le milieu. Et puis, Brel fut le détona_ te ur de sa nouvelle carrière. A l'instar du chanteur, sa vocation serait de devenir créateur. Et le pari est réussi puisque, depuis treize ans, maintenant, Paolo Doss promène son moi intérieur dans la peau d'un clown philosophe. Cinq spectacles ont vu' le jour, dont le dernier «Des espoirs au singulier» était présenté, vendredi dernier, atl ' centre Temps Choisi, au profit de l'association Contact..
Parents/Enfants de Courcelles. Comme dans ses one-man-show précédents «J'ai tout fait dans l'oeuf», «La graine du pêcher», «Plats nets à vendre», «Rêve d'ange heureux», Paolo interpelle l'être humain sur des thèmes aussi divers que la solitude, la peur, la mort, la foi, l'amitié, la trahison. Ses spectacles remportent toujours beaucoup de succès, y compris dans les forums, les écoles, les hôpitaux, les entreprises, ou encore les prisons, où il les présente.

Des jeux de mots en vra
«J'ai perdu mon statut. Comment vais-je faire pour le retrouver?» se demande Paolo tout au long du spectacle.
Pour y répondre, le comédien se dédouble et fait parler son clown intérieur: C'est qu'à l'inverse de l'humoriste, qui se gausse bien souvent des autres, le clown raconte ce qui lui arrive dans sa propre vie. Avec la nuance qu'ici, il ne s'agit'
pas d'un clown blanc, qui représente l'autorité inflexible, mais bien d'un auguste, un souffre-douleur, un faible, qui a la capacité de faire rire ou d'émouvoir. Fin observateur des us et coutumes de nos contemporains, cet auguste va s'impliquer dans des sujets de préoccupation qui collent au monde 'd'aujourd'hui: la course contre le " temps, la mode, les nouvelles technologies, le monde de la finance, la sculpture du corps (le look),... Certaines scènes sont teintées de poésie lorsque l'artiste parle, par exemple, du parcours du spermatozoïde, noyé dans le noir intersidéral, ou encore émouvantes, quand il aborde la détresse des personnes âgées isolées. Mais le comédien peut aussi «se lâcher» sur scène: pour épater la galerie, il tend une raquette de tennis et une balle trois fois plus grandes qu'en réalité, ou encore, pour parodier les Chippendales, exhibe son corps quelque peu dévêtu en entamant quelques pas de danse! Mais là où le comédien atteint véritablement le sommet de son art, c'est dans le verbe. S'inscrivant un peu dans la veine d'un Bruno Coppens ou de Sol, clown québécois (qui lui aussi est habillé en clochard), les jeux de mots, tous plus subtils les uns que les autres, sont légion. Et il faut s'accrocher pour ne pas en manquer, tant le débit de parole est il certains moments rapide! C'est ainsi par exemple. que Je comédien parle de la princesse tripotée de Monaco», la prise de la Bastille devient la prise de la «pastille»,... Evoquant les régimes alimentaires, certains perdent du poids dans l'allé « gresse». La TVA devient la Taxe sur la Vie Achevée,... Bref. Paolo Doss, un vrai magicien des mots!

par J.C.HERIN

metadonnées

Presse
mer, 01 Décembre 1999
Source : 
La nouvelle Gazette